Ainsi était posée la question du Revenu Universel en 1991 par Philippe Van Parijs, économiste et philosophe belge. L’image du surfeur représentait à ses yeux l’archétype du citoyen oisif, qui ne collabore en aucune façon aux exigences de la société.
Le philosophe André Gorz, d’abord opposé au revenu d’existence, répond pour sa part que :
« Seule son inconditionnalité pourra préserver l’inconditionnalité des activités qui n’ont tout leur sens que si elles sont accomplies pour elles-mêmes. »
En effet, qui serait le juge de ce qui est “une bonne activité” et “une mauvaise activité” ? Comment juger cela sans doctrine ? Dans une période de crise écologique, faudrait-il encore récompenser le productivisme ou plutôt se lancer dans la promotion des sciences, de l’art ou du sport ?
Et puis qui dit condition, dit contrôle, nuisant ainsi à la simplification que doit apporter un revenu universel (et aux économies liées), au risque de tomber dans un système à la chinoise, où le gouvernement finit par attribuer des titres de bon et de mauvais citoyen.
Un autre argument renforce encore la thèse du partage inconditionnel. Quand on demandait au prix Nobel d’économie américain Herbert Simon quelle était la part de notre revenu attribuable à notre travail présent, il répondait : « Je suis très généreux si je vous dis 10%. » Le reste s’explique par le travail du passé, les infrastructures, les inventions… Aucune raison dès lors qu’une minorité s’en accapare les fruits.
Van Parijs conclut cependant qu’il faudra sans doute faire des compromis en fonction de la situation politique et sociale et accepter, dans un premier temps, une forme de conditionnalité.